Travailler dans une multinationale, ou même au siège local d’une entreprise étrangère, c’est évoluer dans un environnement multi‑culturel, rapide et hautement compétitif. À peine a‑t‑on compris les règles officielles qu’on se heurte aux logiques informelles : angles morts politiques, réseau d’alliances, influence des fuseaux horaires… Faut‑il absolument devenir un as de la stratégie de couloir – « décoder les non-dits » – pour survivre ? Ou bien l’on peut rester ce collègue appliqué et franc du collier ?
- Règles du jeu vs. stratégie de jeu
- Méthode pratique : cartographier votre écosystème
- La « pause‑café » : perte de temps ou levier d’influence ?
- Peut‑on rester authentique et stratégique ?
1. Règles du jeu versus stratégie de jeu
Prenez une partie de poker : le règlement est le même pour tous, mais certains calculent les probabilités quand d’autres se fient au hasard. Equité ne signifie pas uniformité des tactiques. Dans l’entreprise, signer un contrat de travail revient à accepter les règles minimales (processus RH, éthique, loi). Reste à choisir votre stratégie :
- Mode « bonne élève / bon élève » : livrer impeccablement, sans chercher l’envers du décor.
- Mode « joueur d’échecs » : anticiper alliances, timing budgétaire, visibilité auprès des décideurs.
La vraie question est donc : où placez‑vous le curseur entre conscience politique et intégrité personnelle ?
2. Méthode pratique : cartographier votre écosystème
Inspirée du systemic coaching, cette mini‑exercice aide à « voir le plateau » :
- Au centre d’une feuille, dessinez‑vous.
- Autour, ajoutez les personnes clés : N+1, N+2, pairs, subordonnés, partenaires, jusqu’au siège.
- Pour chacune, notez :
– ses priorités opérationnelles
– ses ambitions de carrière - Reliez les acteurs : dépendance, influence, rivalité, coopération…
- Analysez :
• quels acteurs décident vraiment ?
• qui peut soutenir votre idée ?
• quelle contrainte non dite pèse sur votre projet ?
Vous visualiserez alors où soufflent les vents porteurs ou contraires. L’enjeu n’est pas de manipuler, mais d’éviter naïveté et tunnels d’information.
3. La « pause‑café » : perte de temps ou levier d’influence ?
Beaucoup d’expatrié·e·s asiatiques – moi la première, à mes débuts – trouvent déconcertant de voir leurs collègues français descendre « boire un café » trois fois par jour. Pourtant, c’est souvent devant la machine chaude que :
- se construisent la confiance inter‑personnelle ;
- se partagent les informations tacites ;
- s’obtiennent des micro‑accommodements qui fluidifient les projets.
Considérez donc la pause‑café comme une réunion informelle – payée par l’entreprise – dont l’objectif est de nourrir le capital social. Sans posture forcée : posez des questions, écoutez, offrez un retour constructif. C’est le moyen le plus soft d’« orienter le vent » plutôt que de le subir.
4. Peut‑on rester authentique et stratégique ?
Oui, si l’on accepte deux principes :
- La stratégie n’est pas la manipulation
Elle consiste à choisir quand, à qui et comment présenter vos idées pour maximiser leur impact, sans trahir vos valeurs. - L’éthique se gère comme un budget
Chacun fixe ses lignes rouges. Connaître celles des autres (grâce à la cartographie) aide à éviter les collisions.
En synthèse
- Les règles sont communes ; la tactique est votre responsabilité.
- Cartographier les acteurs dévoile les véritables rapports de forces.
- Les espaces informels sont des zones d’influence.
- Intégrité et « lecture des non-dits » ne sont pas incompatibles.
Entraînez‑vous ! Et, si vous souhaitez un accompagnement personnalisé pour développer votre intelligence politique sans renier votre authenticité, parlons‑en :